
Recruter à l’ère du zero trust, quand l’IA vocale cherche à restaurer la confiance
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L’irruption de l’intelligence artificielle dans les candidatures, sous forme de CV générés, de lettres de motivation optimisées, ou d’agents conçus pour simuler des entretiens, alimente ce que certains observateurs nomment une “ère du zero trust” dans le recrutement. Face à ce diagnostic, des startups, comme Dex à Londres, tentent d’introduire une réponse fondée sur l’IA.
Une IA pour réinjecter de l’humain
Fondée en 2024 par Paddy Lambros et Harry Uglow, anciens cadres d’Atomico, Dex a récemment levé 3,1 millions de dollars auprès d’Andreessen Horowitz et Concept Ventures. La startup développe un “agent vocal” reposant sur de l’IA générative et des algorithmes de matching. L’objectif est d’utiliser l’IA pour obtenir une meilleure compréhension des motivations, des préférences des candidats.
Dex échange directement avec les candidats par la voix, reconstitue un profil riche en intentions et ambitions, puis propose des opportunités. L’IA agit ensuite comme un coach avec la préparation aux entretiens, benchmarks salariaux, et négociation. Côté entreprise, l’agent s’entretient avec les recruteurs pour identifier les besoins explicites et implicites du poste, en se concentrant sur les facteurs comportementaux et culturels.
L’IA contre l’IA
Pour Harry Uglow, CTO de Dex, “nous accélérons vers un environnement sans confiance », où les entreprises font face à des profils sur optimisés voire dolosifs, mais aussi de profils fictifs à but frauduleux, quand les candidats font face à des processus déshumanisés. L’enjeu de Dex n’est pas de réduire les interactions humaines, mais de permettre qu’elles soient les bonnes dès le départ.
Cette vision s’oppose frontalement à une tendance actuelle du marché aec l’automatisation du tri par scoring de CV, souvent renforcée par des outils comme Metaview (UK), HireVue (US) ou Gloat (Israël), qui favorisent les traitements par lots. Dans ce cadre, Dex défend une approche qualitative, appuyée par l’analyse vocale, l’historique comportemental, et l’ajustement mutuel des préférences. En ce sens, elle se positionne davantage comme un agent digital que comme un outil de gestion RH.
En France et en Europe, les signaux faibles émergent
Si Dex concentre aujourd’hui l’attention, d’autres startups explorent ce même champ. En France, Bruce propose une alternative aux agences d’intérim grâce à un matching algorithmique entre offres et profils qualifiés. Maki People, de son côté, développe des tests de recrutement standardisés adossés à des modèles cognitifs, permettant d’évaluer les soft skills avec plus de finesse.
Toutes ces initiatives, bien que différentes dans leur exécution, partagent un même objectif à savoir rétablir un cadre de confiance et de transparence dans des processus devenus opaques.
La voix, levier d’émotion et de sincérité ?
L’utilisation de la voix comme canal d’interaction, permet-elle une meilleure détection de la compatibilité ? Selon plusieurs études menées dans le domaine de la psychologie organisationnelle, la voix transmet des signaux non verbaux cruciaux comme les hésitations, tonalité, rythme. Des éléments que les modèles de traitement du langage commencent à décrypter avec précision.
Pour Dex, cette couche est essentielle à la qualité du matching. “Ce que l’on cherche à comprendre, ce n’est pas uniquement ce que la personne fait, mais comment elle se projette, ce qu’elle valorise, ce qui la fait rester dans une organisation,” explique Paddy Lambros. L’agent IA devient alors un traducteur d’intentions, dans un univers où les signaux sont brouillés par les optimisations tactiques des deux côtés.
Une promesse à valider dans la durée
Si la proposition de Dex séduit sur le papier, elle devra faire ses preuves dans un écosystème encore largement dominé par les plateformes centralisées (LinkedIn, Indeed) et les ATS classiques. La startup reste en phase de bêta fermée et s’adresse pour l’instant à un public restreint, notamment dans les secteurs technologiques et financiers.